Grandeur Nature

Jeu de Rôle en Grandeur Nature

"le Grandeur nature ?, c'est un peu comme une pièce théatre ou les acteurs commencent là ou le scénario n'est plus écrit... Tout peu arriver." Sancho Pancha

"Un GN, c'est gérer le chaos !" MJ Volatil

Le jeu de rôle grandeur nature, appelé généralement "Grandeur Nature", ou parfois jeu de rôle « en live » ou en Semi Réel par les joueurs (abréviations courantes: GN, live) est un Jeu de rôle. Les joueurs y campent un personnage évoluant dans un univers défini, le temps d'une aventure. À la différence du théâtre, les joueurs, ne connaissent ni la fin de l'histoire ni le rôle des autres joueurs. L'histoire nait de l'interaction de chacun et avec les éléments prévus par les organisateurs dans le scénario.

Origine et histoire

Quand, au XVIIème siècle, la Marquise de Sévigné organisait des soirées-mystères au cours desquelles ses invités tentaient de résoudre l'énigme qu'elle leur soumettait, elle ne se doutait pas que quatre siècles plus tard, nos contemporains endosseraient les costumes de son époque pour rejouer l'espace d'un week-end les aventures des Trois mousquetaires ou l'épopée du Masque de fer. Depuis cette époque héroïque où l'exercice intellectuel et l'aspect mondain des réunions prenaient le pas sur le côté théâtral, en passant par divers avatars, le jeu de rôle grandeur nature a suivi tranquillement son petit bonhomme de chemin. Mais il faut avouer qu'entre les soirées de la Marquise et le début des années 1960, il y eut un grand vide. C'est en effet à cette époque que certains hôtels luxueux de la côte sud de l'Angleterre organisèrent les premières murder parties. S'inspirant des romans d'Agatha Christie et dans une atmosphère très british, ils proposaient des week-ends policiers au cours desquels leurs clients fortunés jouaient au détective-amateur sans toutefois vraiment s'impliquer dans un rôle. Des comédiens dissimulés parmi la population de l'hôtel (personnel et clients) déroulaient la trame d'une intrigue policière devant les yeux ébahis des participants, qui assistaient plus à une espèce de film qu'ils ne prenaient vraiment part à l'enquête.

L'apparition du Jeu de rôle sur table

En 1974, naquit Donjons & dragons, le premier jeu de rôle sur table. En partant d'une règle de wargame avec figurines, Gary Gygax inventa le concept du jeu de rôle : quelques joueurs incarnaient les héros d'un univers médiéval-fantastique dans une aventure créée et animée par un meneur de jeu. Les premières ébauches du jeu proposaient simplement une partie de chasse au trésor.

Puis le jeu de rôle évolua et fit une meilleure place à l'interprétation du rôle. Les personnages devinrent de plus en plus vivants, disposaient maintenant d'un passé, d'une psychologie, d'un caractère et de motivations autres que la victoire sur des monstres ou l'accumulation de trésors et d'objets magiques.

Donjons & Dragons fut bientôt suivi par une pléiade de petits frères. Le thème le plus souvent traité dans les jeux de rôle était le médiéval-fantastique, mais d'autres univers furent peu à peu abordés: la science-fiction, les années 1920, l'horreur gothique, le western, l'espionnage, les pirates, pour n'en citer que quelques-uns.

La rencontre et le passage en Grandeur Nature

C'est en 1983 qu'eut lieu la grande rencontre entre le jeu de rôle, largement pratiqué sur table aux quatre coins du monde, et les jeux grandeur nature impliquant physiquement leurs participants dans des aventures réelles. En Angleterre, quelques personnes désirant expérimenter pour de vrai les histoires qu'ils vivaient par l'intermédiaire de leurs personnages autour d'une table, organisèrent les premiers live role-playing games ou live action role-play.

Puisant dans l'imaginaire de Donjons & Dragons, ils endossèrent, qui une armure, qui une robe de magicien, proposèrent à quelques amis de jouer le rôle des monstres et explorèrent les souterrains des vieux châteaux britanniques. Dans ces premiers véritables jeux de rôle grandeur nature, on retrouvait tous les ingrédients du célébrissime jeu de rôle sur table : couloirs obscurs, pièges, monstres agressifs et trésors. Les Britanniques disposant d'un grand nombre de châteaux en plutôt bon état (ils n'ont pas eu un cardinal de Richelieu pour les faire raser. . .), il leur était très facile de trouver le décor de leurs aventures. Lors de ces toutes premières versions du jeu de rôle grandeur nature, l'interprétation du personnage restait très secondaire, et les joueurs n'endossaient qu'un rôle générique, donnant droit à différents pouvoirs. Le guerrier recevait le bénéfice d'un bouclier, d'une bonne épée (en mousse !) et de nombreux points de vie ; le voleur pouvait repérer les pièges que lui signalait l'arbitre; le magicien disposait de quelques pétards et autres gadgets simulant ses sortilèges, etc.

En 1984, les premiers jeux de rôle grandeur nature firent leur apparition en France. Deux clubs de jeux de rôle sur table, l'un à Paris (l'AJT) et l'autre en Bretagne (Stratèges & Maléfices, à Nantes) mirent en place presque simultanément leur premier GN. L'influence de Donjons & Dragons était toujours très forte mais les aventures se déroulaient cette fois en forêt (un décor privilégié de ce genre de loisirs). Puis les premières parties grandeur nature s'organisèrent dans de vieux manoirs à l'aspect inquiétant. Les scénarios se déroulaient dans une ambiance beaucoup plus feutrée et mondaine. . . Peu à peu, l'engouement des joueurs de jeux de rôle augmenta et de nombreux clubs de jeu organisèrent leur jeu de rôle grandeur nature annuel ou bisannuel. En 1985, les premières associations (loi 1901) spécialisées dans l'organisation de jeux de rôle grandeur nature se créèrent.

Après quelques tâtonnements, un style à la française fait son apparition à l'arrivée du GN sur le sol français. Il privilégie le personnage, sa psychologie, son histoire personnelle (le background), le roleplay, l'improvisation et encadre l'action par un scénario apparemment plus profond. En Angleterre, et dans le monde anglo-saxon, l'action et le système de jeu avec sa course aux avantages et au perfectionnement des qualités de combats des personnages, persistait comme une sorte de jeu physique de stratégie réunissant, déjà pour des grands événements des, milliers de joueurs pour des batailles géantes.

Au début des années 1990, le jeu de rôle grandeur nature prit son essor et quitta le milieu confidentiel des rôlistes. Il connut un indéniable effet de mode et des sociétés le proposèrent sous forme de murder party à leurs employés, des agences en événementiel

s’emparèrent du concept.

De 1994 à 1997, il subit une déferlante médiatique hostile à la suite de trois événements dramatiques. Le plus tragique fut le suicide d'un jeune à Amiens en février 1994, attribué abusivement aux jeux de rôles par la presse et la télévision. Les rôlistes eurent à faire face à des tracasseries, des pressions et des refus d’autorisations concernant des locaux ou des subventions. La « piste rôliste » de la profanation du cimetière juif de Carpentras en 1995, —qui se révèlera fausse dès 1996— amplifia l’ambiance délétère à l’encontre de ce loisir. La Fédération Française des Jeux de Rôles Grandeur Nature (Fédé GN) fut fondée en 1995, avant même l’apparition de fédération française de jeu de rôle sur table, la ffjdr (août 1996) afin de représenter le Grandeur Nature et de le défendre.

Mais depuis on peut constater un net assainissement des relations avec les pouvoirs publics puis dans les années suivantes avec la presse, semble-t-il, grâce aux instances de la fédération et de certains joueurs qui n'ont pas hésité à écrire des livres et exiger des droits de réponse. Des animateurs/trices de centres culturels, educateurs/trices spécialisé(e)s et autres acteurs territoriaux présentent désormais la dynamique engendrée par ces activités dans les villages de France. Les anciennes générations comprennent le tremplin à la créativité que cela engendre ainsi que la redécouverte culturelle et du patrimoine. Utiliser des tuniques de GN pour participer à une fête traditionnelle est un des exemples d'enrichissement du territoire par ses habitants.